Editorial de décembre 2016 : La Fabrique d’un mensonge
Le doute s’installe alors que de nombreux scientifiques tirent la sonnette d’alarme. L’Union Européenne a élaboré ses propres éléments de preuve pour échapper à une réglementation trop stricte. En effet, ce sont les scientifiques qui réclament à Bruxelles et à la communauté internationale d’agir contre les fameux perturbateurs endocriniens. C’est en novembre, que la commission européenne donnait son avis vis-à-vis de ce fléau, qui selon encore les chercheurs serait à l’origine d’importantes maladies en lien avec le système hormonal, cancers du sein, du testicule, de l’ovaire ou de la prostate, troubles du développement du cerveau… La liste est longue de ces maladies en augmentation chez l’homme.
Cette menace mondiale pour la santé est bien réelle, en cause beaucoup d’objets du quotidien comme les agents plastifiants dans les matières plastiques, certains produits d’hygiène, les emballages ou encore les résidus de pesticides que l’on trouve dans nos légumes ou fruits à l’étalage de nos commerces. Interférant avec les hormones naturelles lors de notre développement pendant la grossesse ou la puberté, lorsque l’organisme se met en place, cette période est particulièrement sensible à ces éléments nocifs pour notre évolution.
La science reste la cible lorsque ces découvertes peuvent gêner de puissants intérêts commerciaux. Le déni comme le financement par des lobbies industriels s’appuient alors sur des scientifiques soutenus par les intérêts des empoisonneurs pour semer le doute. On l’a vu avec l’industrie du tabac qui a freiné pendant des années les résultats catastrophiques de sa dangerosité. Cette fabrication du doute agit aujourd’hui dans plusieurs domaines comme la pétrochimie qui à elle seule, est à l’origine de milliers de produits toxiques augmentant, en plus les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
La commission européenne ne doit pas se laisser influencer, et donner son avis en pleine conscience. Jouant avec les mots finalement, le texte adopté par la commission en novembre place les perturbateurs endocriniens comme les autres produits chimiques, déplaçant le problème et donc l’évaluation du risque au cas par cas alors que le premier texte parlait bien de les interdire tout bonnement.
Ce n’est pas nouveau certes, mais en 2016 et bientôt 2017, ces méthodes deviennent très pénibles. La Commission européenne, c’est-à-dire les fonctionnaires de l’Europe ont fait le choix de s’appuyer sur des études financées en fait par les industriels eux- mêmes ! Ne pouvant l’ignorer, ils placent donc leur conclusion avant le législateur du Parlement Européen qui lui avait bien interdit les pesticides identifiés comme perturbateurs endocriniens dès 2009. A l’heure où l’Europe est discréditée dans de nombreux pays membres, ce lobbying visible est inquiétant. Nous sommes tous concernés, ces perturbateurs endocriniens nous entourent, nul n’y échappe.