Edito de mars 2020 : Moins d’atome plus de renouvelable
Le 22 février, le premier réacteur de la plus vieille centrale nucléaire en activité en France, Fessenheim, s’est arrêté après 43 ans de service et le débranchement de son frère jumeau est prévu pour cet été. Une fermeture débattue, étudiée, planifiée et maintes fois repoussée. François Hollande l’a annoncé, Emmanuel Macron l’a fait. Avec cette centrale alsacienne devenue un totem, la France se prive ainsi d’une production d’électricité au plus bas coût européen dans des conditions fiables d’après l’Autorité de sûreté nucléaire. Avec elle, débute l’extinction progressive des unités construites entre les années Pompidou et Mitterrand, les années folles du nucléaire tricolore.
Certains s’en affligent, prétextant que c’est l’énergie dont nous avons besoin pour pouvoir sortir des combustibles fossiles, une électricité pilotable et très peu carbonée. Car même si les énergies renouvelables se développent, elles restent encore loin de remplir nos besoins en électricité. La production annuelle de la centrale de Fessenheim était équivalente à celle de tous les panneaux photovoltaïques de France. Les supers batteries à un coût compétitif et aucune pollution à la fabrication et au recyclage reste à inventer encore.
Mais, la révolution de l’électro-mobilité ou la croissance du numérique évolueront comme aujourd’hui en fonction des usages, des pics de consommation et nécessiteront une fourniture régulière d’électricité que les énergies renouvelables intermittentes, éolien, photo-voltaïque et hydraulique, ne pourront fournir. Les Allemands depuis leur sortie du nucléaire ont réussi ce prodige d’augmenter leurs émissions de gaz à effet de serre, d’accroître la production de charbon et leur dépendance au gaz russe et de faire appel au nucléaire français lorsque le manque se faisait sentir. Un passage obligé avant de pouvoir compter exclusivement sur ces énergies vertes. En attendant, elle vend à prix zéro ou presque à certains moments leurs excédents de production de renouvelables !
Certains rassurent et affirment que l’arrêt de Fessenheim et bientôt d’ici 2035, douze autres réacteurs de première génération, ne nous dirige pas vers une hausse de nos émissions en CO2 due à la production de charbon ou de gaz pour compenser, ni vers un retour à la bougie pour nous éclairer. Car si le nucléaire est bas en carbone, il pollue gravement et durablement la planète. Avec cette période de fermeture s’amorce surtout une refonte complète de notre paysage énergétique. Passer de 71% de part de nucléaire dans notre consommation nationale à 50% pour jouer à part égale avec le renouvelable, la solution semble plutôt résider dans les gisements d’économies d’énergie. La rénovation thermique des logements par exemple ou le renouvellement des vieux chauffages électriques, l’arrêt des écrans publicitaires lumineux aux abords des centres commerciaux ou dans le métro en cas de pic de consommation.
Pourquoi pas moins de nucléaire, je ne suis pas contre, bien au contraire mais j’ai cette impression, à l’exemple de l’Allemagne, qu’avant de fermer les réacteurs, il faudrait réfléchir et organiser la filière. Et même si les efforts ont l’air d’aller dans le bon sens, la France est encore bien loin de se passer de l’atome.