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…Au mois de mai, la rose !

Avis aux bacheliers : ce poème extrait d’un « tombeau » littéraire beaucoup plus long est souvent au programme de l’oral de français. Sa beauté très simple cache de belles histoires…

Qui n’a jamais entendu par chez nous ces vers qui coulent tout seul, ces merveilles d’assemblage (comme du bon vin !) de mots et de sonorités, d’images :

Comme on voit sur la branche au mois de may la rose
En sa belle jeunesse, en sa première fleur,
Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur,
Quand l’Aube de ses pleurs au poinct du jour l’arrose […]

Mai… Nous y sommes ! Je me représente facilement notre Pierrot arpenter ses beaux jardins de la Possonnière, tôt le matin… Et puis le soir. Là, ne retrouvant plus que plissée et flétrie, déjà, la fleur qu’il avait admirée à l’aube, il s’émeut d’une telle vie éphémère qui évoque soudain celle de notre vie d’Homme. Il regarde, il songe, il pose un genou à terre, même, pour mieux tenir dans le berceau de sa main les quelques pétales qui, bientôt tomberont.

La maîtresse d’un roi

L’histoire de ce poème est celle d’un sens (presque) caché. Sur une commande d’Henri III, tout juste roi, faite au poète très en cour qu’il est devenu, Ronsard, déjà quinquagénaire, doit livrer au prince un long poème d’adieu à sa maîtresse Marie de Clèves. Celle-ci, disparue très jeune à 20 ou 21 ans, était l’épouse du prince de Condé, rendu très jaloux par cette passion que l’ancien duc d’Anjou nourrissait à son égard. On appelle une telle œuvre une «commande de circonstance». Ce que le roi ne sait pas alors, c’est que le poète, lui aussi, vient de perdre une Marie aimée. Elle a nom Dupin, plus connue dans son œuvre comme Marie de Bourgueil… Vous l’avez reconnue : c’est la petite paysanne ligérienne du Voyage de Tours !

Blessé lui-même par la perte d’une belle qui n’a pourtant jamais été sa maîtresse mais dont il a toujours gardé un souvenir très vif depuis sa jeunesse, il compose une œuvre de plus de 300 vers en quatre parties. Et c’est la dernière que la postérité retiendra le plus facilement. Logique, car elle se termine par l’image rêvée :

Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses.

Les lycéens qui préparent leur oral de français apprennent généralement à décrypter ce beau poème où l’Histoire de France rencontre les amours déçues du chef de la Pléiade et le thème universel de la vie qui, comme la rose en un jour, se fane, se flétrit, disparait. Au matin, le ciel en est jaloux, l’aube en pleure de rosée. Mais le soir, c’est Ronsard qui arrose à la fois la fleur et sa belle de ses larmes et de ses pleurs.

Quant au petit roi Henri III, il ne se remit jamais de la mort de «sa» Marie : on dit que Louise de Vaudémont, une princesse Lorraine qu’il épousa ensuite ressemblait étrangement à Marie de Clèves…

 

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