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Lorsque M. de Chartres , le futur roi des Français, séjourna à Vendôme

Du mois de juin au mois d’août 1791, Louis-Philippe, duc de Chartres, nommé colonel du 14e régiment de dragons à Vendôme, va quelque peu marquer la vie locale. Son bref séjour dans notre ville, fort bien rempli d’ailleurs, sera émaillé de plusieurs événements et de quelques anecdotes. En voici un court résumé.

 

Son arrivée
Le 24 mai (1791), la municipalité apprenait ainsi l’arrivée de ce régiment de dragons à la tête duquel, justement, M de Chartres allait bientôt être nommé.
Si antérieurement à 1740, tous les régiments de passage à Vendôme logeaient chez l’habitant, après cette date, la ville s’était efforcée… par obligation, de leur fournir plusieurs lieux de rassemblements, dénommés alors «casernes». Si quelques officiers étaient toujours hébergés chez les particuliers, les soldats et leurs chevaux, à de rares exceptions près, occupaient désormais un certain nombre de bâtiments et d’écuries acquis par la ville. À Vendôme, nous avions maintenant plusieurs casernes :
La caserne du Grand Pressoir située en haut du faubourg Saint-Lubin, côté ‘est’ ; la caserne du Croissant, joignant la précédente ; la caserne de l’Écu, faubourg Chartrain (emplacement de la rue Saint-Denis) ; la caserne Saint-Michel sise au « faubourg des Quatre-Huys » (mais non située exactement); enfin les écuries de l’auberge des Trois Marchands, faubourg Saint-Lubin (n° 35-37 de l’actuelle rue).
Comme souvent en pareil cas, la venue de ce régiment de dragons ne fut guère souhaitée, aussi sa réception solennelle prévue par les «Amis de la Constitution» de Vendôme fut-elle annulée et la municipalité défendit même à sa garde nationale d’aller à sa rencontre.
M de Chartres, lui, arriva le 15 juin suivant. Là aussi, la bienvenue des officiers déjà en place depuis trois semaines ne fut pas des plus chaleureuses : «…Je suis arrivé à Vendôme à 2 heures un quart (de l’après-midi) ; quelque temps après est venu M Lagrendu, premier lieutenant-colonel et bientôt après MM les officiers. Leur accueil a été très froid…»

 

Sa vie vendômoise
Pensant loger, dans un premier temps, à l’auberge, il se résigna, sur les conseils d’un de ses officiers, à emménager chez M de Pérignat (43, rue Poterie), bien que cette maison fût «horriblement chère».
Le 16 juin, M. de Chartres visitait, selon les usages, M. le maire, le président du district et plusieurs autres personnalités de la ville. Le même jour, après avoir été reconnu publiquement comme colonel par les officiers, il se rendit, fonction oblige, au club des Amis de la Constitution : «…J’y ai été reçu avec de nombreux applaudissements ; M le président m’a adressé un discours sur l’exemple que je donnais et sur le plaisir qu’éprouvait la société à me voir assis parmi ses membres… En réponse, je me portais garant du patriotisme et de la discipline de mon régiment que j’avais l’honneur de commander».

Le 17, recevant à son tour la visite du maire, M de Chartres lui assurait la tranquillité publique et de bonnes relations du régiment avec la municipalité.
Le 18, il s’inscrivit au club des Amis de la Constitution, ne pouvant faire moins, rejoint par quelques-uns de ses sous-officiers et dragons. Dès le lendemain, dimanche 19 juin, présent à la messe comme il se devait, il s’offusqua de la mauvaise tenue de certains de ses officiers et leur fit savoir ; dans la soirée, apprécié par ses nouveaux compagnons du Club, ceux-ci le nommèrent de suite président par intérim.
Le 23, jour de la Fête-Dieu, M de Chartres assista, à la tête de son régiment, à la procession du Saint-Sacrement non sans avoir été prié par la municipalité de doubler la garde, de faire arrêter toutes les voitures (hippomobiles) et d’assurer la tranquillité. Pourtant, ce jour-là, M le duc dut payer de sa personne pour protéger deux pauvres prêtres «réfractaires» que la vindicte populaire voulait pendre : «ils sont violataires de la loi, il faut qu’ils soient pendus à la lanterne». L’affaire virant bientôt à l’émeute, en présence de notables, il fit promettre aux Vendômois présents les plus excités de ne rien entreprendre, ce qu’ils firent à regret et après bien des palabres et des menaces. Les deux hommes furent emprisonnés, dénoncés à l’accusateur public qui les traduisit en justice.

(à suivre)

Jean-Claude Pasquier

 

Sources : Vendôme pendant la Révolution de C. Métais. Bulletins de la Société Archéologique du Vendômois. Archives personnelles.
Iconographie : collection particulière

Article paru dans notre édition de Mars 2010

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