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Une image… Dans l’Histoire

Regardez bien cette vue prise jeudi 24 octobre 1940 par le photographe de Hitler qu’on distingue par ailleurs de face dans le film de propagande de l’époque : elle est prise sur le quai central de la gare de Montoire, près d’un abri pour voyageurs – tous deux disparus.

Si je voulais consoler les Montoiriens qui regrettent toujours que le joli nom de leur cité soit associé à l’entrée dans la Collaboration de Vichy avec l’Allemagne nazie, je leur dirais qu’il ne s’est (presque) rien passé ce jour-là.

De fait, cette fameuse image de la «poignée de main» entre vainqueur et vaincu fut surexploitée par les services de presse nazis pour tenter de convaincre au moins une partie de la population française qu’une cohabitation était possible. Le but, pour Hitler, était bien sûr de faciliter l’occupation par ses troupes.

La ville envahie par l’armée

En réalité, rien ne fut décidé le 24 octobre dans notre vallée du Loir, pas plus que le 22, jour où Pierre Laval, chef du gouvernement français, avait lui-même rencontré le Führer une première fois, à son initiative ! Hitler avait – savez-vous ? – d’autres chats à fouetter. Il se rendait à la frontière espagnole pour demander à Franco d’entrer dans la guerre et devait faire de même à Florence quelques jours plus tard avec Mussolini. Entre les deux, il accepta de recevoir le «vainqueur de Verdun» dans son train privé – s’il vous plait – stationné à Montoire, non loin du tunnel de Saint-Rimay en cas d’attaque aérienne.

Pétain et Laval était partis de Tours en voiture tôt le matin. Un bataillon de soldats allemands leur fit une haie d’honneur tout le long de la rue de la gare, avant qu’ils ne soient salués à leur descente par le ministre des Affaires étrangères qui les conduisit au train de Hitler.

Montoire fit les frais de cette mise en scène malsaine. La ville – 2800 habitants à l’époque – fut envahie toute la semaine par des bataillons armés jusqu’aux dents qui opérèrent des fouilles. Des avions volaient bas, des automitrailleuses et des voitures blindées sillonnaient la ville. Les voisins de la gare furent délogés, on déroula le tapis rouge emprunté à l’église pour accueillir le chef de l’État français et l’on fit goûter au maire le lait réclamé par Hitler en son wagon privé !

De Gaulle écrit aux Montoiriens

Pétain, de son côté, décida de tirer parti de «l’Entrevue de Montoire». Il pondit un discours à la radio le 30 octobre en expliquant, qu’il pensait aux prisonniers (un million !), aux frais d’occupation, aux souffrances du pays, au ravitaillement, à la ligne de démarcation, etc. Des mots que les premiers résistants mirent en face de ceux de l’Appel du 18 juin, au contraire offensif vis-à-vis de l’ennemi. C’est bien cela que retient la mémoire collective aujourd’hui – et forcément, l’Histoire – la confrontation de deux images : le micro de Londres et la poignée de main de Montoire.

De Gaulle en était bien conscient, qui formula par la suite au maire «l’assurance de toute sa sympathie à l’égard des habitants de Montoire.». Et l’on peut s’arrêter sur une autre image, celle d’une fillette offrant des fleurs à un soldat américain lors du 1ᵉʳ anniversaire de la Libération… Devant la gare, devenue depuis un musée-lieu de mémoire à visiter  !

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