Crise de l’énergie : ils ont tout changé !
L’électricité qui flambe, le bois qui se raréfie, le prix du gaz qui explose, chacun tente de remédier au scénario catastrophe annoncé. Des Clouzeaux à Savigny, en passant par Montoire, trois manières de faire face. De la raison au déni, jusqu’à la démesure. Immersion dans trois foyers du Vendômois.
Mon chauffage à poil dur
Une maisonnée aux volets défraîchis, aux confins d’un chemin de terre et des champs, entre les Roches et les Clouzeaux, Sylvain* nous accueille avec méfiance. Quand on évoque le sujet qui nous occupe, son visage s’illumine, comme une envie d’en découdre. « Je ne chauffe plus. Chez moi, pas de radiateurs, la cheminée est hors d’usage et je m’organise à ma façon. » En effet, dans la maison baignée d’humidité, des couvertures et des plaids partout, sur le canapé, sur la table de la cuisine, sur le bord de la fenêtre. « On nous fait peur, on justifie les augmentations par tout et n’importe quoi. La guerre a bon dos. » Fâché, fâché, fâché. Dans la pièce, un petit teckel gambade joyeusement. « Le voilà mon chauffage, on dort ensemble, on se tient chaud. Une bonne soupe, un ou deux verres de rouge, et la nuit passe tranquille. » Radical le bonhomme. En quittant la maison, on aperçoit quand même dans l’encoignure de la porte de sa chambre un petit chauffage d’appoint, probablement à bain d’huile…
Des bûches pour Noël
Gilles et Sylvie* dispose d’une chaudière à fuel. Devant les difficultés d’approvisionnement et l’augmentation des tarifs, ils ont réactivé les deux cheminées de la maison. « Elles n’avaient plus fonctionné depuis 10 ans. On a appelé un fumiste et moyennant quelques centaines d’euros et un bon ramonage, elles ont repris du service », se réjouit le retraité. Sylvie acquiesce : « Mes parents ont un petit bois, ils nous fournissent quelques stères et ça nous va comme ça. On leur en a commandé deux pour Noël, en guise de cadeau. » En secours, il reste quelques dizaines de litres dans la chaudière, si la température devenait intenable, ils s’en serviront pour « casser le froid ». Pragmatique…
Ça chauffe à Savigny
Valériane* a pris le contre-pied total des recommandations institutionnelles. Elle justifie son comportement par la présence dans son appartement d’un nourrisson de six mois. « Mes radiateurs électriques tournent jour et nuit. Pas moins de 23°C dans la pièce principale et 20°C dans les chambres. » Pas loin de l’énervement devant nos questions. « On nous prend pour des enfants ! Portez le masque, faites votre attestation, baissez la température, reportez vos machines à laver… C’est insupportable ! » Et quand on évoque la facture à venir : « Je paierai en retard ou en plusieurs fois. Nous serons nombreux dans ce cas, EDF va être obligée de faire avec. »
Entre raison, déni et abandon, ces trois cas de figures ne sont sans doute pas spécifiques au Loir-et-Cher. Mais vivre à la campagne accentue à l’évidence le ressenti climatique en période de grand froid. Nos anciens s’en souviennent, bouillottes à l’appui, notre confort contemporain est un luxe qui se fait cruel en période de disette.
* A la demande des participants, les prénoms ont été modifiés.