Regard posé en VendômoisÉconomie et société

«J’ai un roman qui me trotte dans la tête»

Emilie Rencien nous livre les coulisses de son métier

Figure du journalisme local, reconnue pour son engagement pour sa région et sa plume incisive. Emilie Rencien, journaliste au Petit Solognot, grand frère du Petit Vendômois, nous livre les coulisses de son métier et les contours de son parcours.

Le journalisme, une vocation première ou un hasard de l’existence ?

«Ce n’est pas un hasard. Enfant, j’écrivais de brèves histoires, inspirées parfois des dessins animés, ou bien des poèmes aux rimes engagées sur l’actualité politique (Saddam Hussein m’avait notamment inspirée en école primaire!). J’adorais lire et les devoirs-rédactions étaient pour moi un exercice favori. Ce n’est pas un hasard et, en même temps, je voulais plutôt au départ devenir soit styliste, soit écrivain, soit scénariste, soit chanteuse. J’ai même tenté en troisième un stage d’observation chez un vétérinaire, car j’aimais (et j’aime toujours) beaucoup les animaux, mais j’ai vite bifurqué car je détestais les maths, les sciences, et un chien a failli me mordre (Rires). J’ai donc cherché un métier qui lie mes appétences artistiques et littéraires, et il se trouve qu’en classe de seconde, à l’interrogation d’un professeur en début d’année sur le métier choisi, j’ai spontanément répondu  : journaliste ! Je trouvais que je pourrais écrire et raconter l’histoire de gens rencontrés; je voulais en sus un travail sans routine et avec du mouvement. Ce n’est pas une vocation à proprement parler, bien qu’en quelque sorte, un peu, puisque j’ai opté sans hésiter pour la presse écrite plutôt qu’un autre type de média d’emblée. Et je n’en ai pas démordu, Je suis montée à Paris pour ça. Malgré ma timidité et certains commentaires d’autres enseignants qui ont tenté de me décourager car ils me trouvaient trop réservée. Comme quoi, il faut suivre ses idées… ».

Sous l’impulsion d’Agnès et d’André Fleury, le Petit Vendômois est né il y trente-quatre ans, avec l’aide du Petit Solognot… Vous étiez au courant de cette filiation ?

«Je ne connais pas tous les tenants et aboutissants exacts mais oui, je sais qu’il y a un lien. J’ai entendu plusieurs fois l’histoire racontée – je cite ma source pour une fois !- par l’ancien rédacteur en chef et co-créateur du Petit Solognot, Gérard Bardon.»

Vous êtes reconnue pour vos éditos, pertinents et incisifs, c’est un exercice journalistique particulier ?

«Pour certains, ce n’est pas du journalisme. Pour d’autres, il s’agit de journalisme militant. Mais cela constitue bien un exercice particulier, qui donne la ligne éditoriale du journal et où il est possible d’injecter de l’opinion, contrairement à un article classique qui doit être plus factuel. C’est un style plus engagé. Bien que j’ai la chance d’être dans une rédaction qui accepte de laisser ma plume libre en toute circonstance. Pour revenir à l’édito, pour moi, c’est une sorte de récréation où je peux m’exprimer sur tout sujet, qu’il soit local, national ou mondial qui me tient à cœur, m’interpelle sur le moment, etc. J’aime jouer avec les mots et il arrive que mes billets affichent des doubles sens. Il faut savoir lire entre mes lignes ! »

NRJ, France 3, autrice, vous avez un parcours riche et varié, pourquoi ce choix de la presse locale ?

«En vrai, entre nous, à la base, je souhaitais travailler en presse nationale. Les hasards de la vie m’ont ramené en Loir-et-Cher, mon département natal. Il est souvent plus aisé de débuter en free-lance, à la pige, en province. Ma collaboration pour divers titres en Centre-Val de Loire fut très formatrice et la presse locale permet pléthore de papiers et d’expériences (bon nombre de ministres et de Présidents de la République croisés ici !). Désormais en poste, je saisis les opportunités régionales et nationales qui viennent à moi, notamment celle de faire de la TV. La chaîne NRJ 12 avait repéré l’un de mes éditos sur le coiffeur disparu Jacques Dessange sur mon Twitter. Pour France 3, j’adore suivre le monde politique et c’est sur ce sujet en particulier que je suis invitée. Enfin, autre aventure : j’ai en effet co-écrit (avec un correspondant de presse, Georges Brown) un livre sur le château de Chambord chez l’éditeur Ramsay-Vilo en 2019, dans le cadre des 500 ans de la Renaissance en Val de Loire et à l’occasion de la sortie du long métrage « Chambord » de Laurent Charbonnier. En sachant que j’avais co-écrit un livre sur la gastronomie de Sologne (éditions CPE) avec Gérard Bardon en 2007.»

Quelles sont les singularités de travailler pour un journal gratuit ?

«De prime abord, la périodicité : au Petit Solognot, nous paraissons tous les quinze jours. Ensuite, ce type de journal vit uniquement des recettes de la publicité et des annonceurs, contrairement à un quotidien qui possède publicité et lecteurs payants. Cela n’empêche par contre pas d’écrire sur l’actualité, il faut juste s’adapter à un rythme temporel différent. Et je considère, et cela n’engage que moi, qu’avoir une plume incisive comme la mienne est un plus lorsque le support papier paraît 15 jours après un évènement. Cela injecte un intérêt de lecture supplémentaire au lecteur qui peut avoir déjà croisé l’information ailleurs avant; cela évite une redite lassante à une époque où le zapping média devient légion.»

Suite à la publication d’un de vos articles sur l’engrillagement en Sologne, vous avez été l’objet d’une plainte en septembre 2021. Qu’en est-il aujourd’hui ?

«La mise en examen «pour complicité de diffamation envers un particulier», reçue à la rentrée dernière, porte sur une news que j’avais postée sur notre site web. Celle-ci reprenait dans un rôle d’information le communiqué de presse émis par la région Centre, signé et co-rédigé en mai 2020 par François Bonneau, président du Conseil régional, et le cinéaste Nicolas Vanier, au sujet de l’engrillagement en Sologne et à l’attention d’Elisabeth Borne (qui n’était pas encore Première ministre mais alors ministre de la transition écologique !). Trois noms de grands propriétaires solognots étaient cités publiquement dans ce communiqué; c’est l’un d’eux qui a déposé plainte contre notre journal (enfin, envers moi-même et ma directrice de publication, Mme Rose). Quelques autres médias (et sans doute élus…), qui avaient partagé la nouvelle, en ont fait aussi l’objet depuis. La procédure court sur une année et il ne se passe pas grand-chose en fait. Nous essayons tous les 15 jours de publier dans nos colonnes des articles liés à cette thématique; les gens nous alertent volontiers depuis la médiatisation de notre «affaire». Pendant ce temps, avant le terme, nous pouvons demander à être entendues par le tribunal judiciaire de Paris; ce que nous comptons faire via notre avocat. »

Quels sont vos projets professionnels ?

«J’ai de temps à autre l’idée d’un roman qui me trotte dans la tête. Aussi, pour raccrocher les wagons d’une de vos précédentes questions, j’aimerais revenir à mes premières velléités un jour prochain, un média national… J’aime beaucoup la capitale et la région PACA : si le Canard Enchaîné ou Nice / Var Matin me lisent par exemple… Je suis toute ouïe ! (Rires) Et pourquoi pas, la télévision aussi.».

Jean-Michel Véry

Journaliste à Politis, à Europe 1, au Petit Vendomois, rédacteur "tourisme" à Néoplanète, pigiste au Figaro et à l'Optimun.

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