La grande « battle » des sapins
Mon beau sapin, roi des forêts ? Ils vont bientôt se poser en devanture des jardineries et des fleuristes. Alors, pour Noël, naturel ou artificiel ? Un débat paisible, traversé d’arguments plus ou moins vérifiables, souvent versés dans l’écologie. Nous vous avons posé la question.
« Nous avons un sapin artificiel depuis plusieurs années. Nous le ressortons de la cave à chaque Noël. On consomme moins, on ne jette pas, c’est un geste écolo en somme », se targue Marie-Louise, maman de deux jeunes garçons. Faux, nul, zéro.
En effet, selon une étude québécoise du cabinet Ellipsos*, le sapin artificiel émet 8,1 kg de CO2 chaque année, le sapin naturel, lui, en émet 3,1 kg par an. Selon cette même étude, le sapin artificiel a aussi trois fois plus d’impact sur le changement climatique que le sapin naturel. Un constat qui s’explique essentiellement par le produit en lui-même. Le sapin artificiel est fabriqué en plastique en majorité et, pire, il est produit à partir de pétrole. S’y ajoutent les émissions polluantes provoquées par sa production industrielle et son importation, par bateau, d’Asie. Et l’Association française du Sapin de Noël Naturel (AFSNN) enfonce l’aiguille : « 99,9%» des sapins artificiels viennent d’Asie et le sapin artificiel n’est pas recyclable ».
«Le bonheur du chat»
« À la maison, c’est naturel à fond. La couleur, l’odeur, les épines par terre, c’est le charme. Et puis, ça fait le bonheur du chat… », s’amuse Jean-Philippe, employé dans une jardinerie de Vendôme. Effectivement, mais tout n’est pas vert. C’est un fait, le sapin naturel est, comme son nom l’indique, naturel. Il pousse chez nous, c’est un produit agricole, de notre terroir. Il est frais. En réalité, il pousse en France, mais est également importé des pays nordiques. Le fameux Nordmann, par exemple, arrive du Danemark mais est originaire du Caucase et de Turquie. Une trotte pour arriver dans le Loir-et-Cher. L’étude québécoise précise par ailleurs que les sapins «ne sont pas prélevés en forêt. Ils forment une culture et sont élevés pour ça. Avec une durée de vie de 10 ans, il faut donc les retirer à terme. On ne les prélève pas tous la même année et chaque sapin est ensuite remplacé par une nouvelle plantation». De plus, le sapin naturel a aussi l’avantage d’«absorber le CO2», responsable du réchauffement climatique et qu’il constitue en cela «un puits de carbone». Enfin, une fois Noël passé, le sapin naturel est également biodégradable ou recyclable. Il peut aussi être replanté.
Le naturel a aussi ses tares
« Nous, on alterne d’un Noël à l’autre. Une affaire de temps, de transport, d’opportunité ou de budget. L’artificiel est une solution de secours », explique Delphine, qui travaille en mairie. Le couple a conservé un sapin plastique acheté en dépannage il y a cinq ans.
Mais le naturel a lui aussi ses tares. D’abord, sa culture implique souvent des produits phytosanitaires, comme le glyphosate, les pesticides ou les fongicides et parfois même des hormones de croissance. D’autre part, la culture de sapins est une monoculture, avec pour conséquence l’épuisement des sols en nutriments et une atteinte à la biodiversité.
Bilan. À moins de le conserver au moins une vingtaine d’années pour amortir son empreinte carbone (et égaler celle d’un sapin naturel), un sapin artificiel est donc incontestablement moins écoresponsable. Qui s’y frotte s’y pique, mais joyeux Noël quand même !
Jean-Noël Rivey