La pancarte de Villechauve
En a-t-elle connu de belles heures de confréries, la «commune d’honneur des chauves de France» ! Mais la mode en a passé. Reste le fameux panneau d’entrée d’agglomération, toujours photographié.
«Non, rien de prévu, aucun contact, on n’a plus de nouvelles des chauves» répondent de concert la secrétaire et le maire. Pas de regret, pas de relance envisagée… Villechauve et les chauves, c’est déjà du passé, peut-être remplacé par les nouveaux chemins de Saint-Jacques et de Saint-Martin qui font étape ici. Il en reste pourtant des traces, de ces grandes heures de la Confrérie nationale qui drainait ici en septembre des centaines de curieux, les familles de ses membres, la presse, etc. L’humoriste Sim y est venu, en compagnie de Patrick Sabatier qui dut tricher pour la photo ! Exception qui confirme la règle : le président Giscard, illustre représentant de la Calvitie résidant à Authon, n’est jamais venu en voisin.
Née en 1957 de l’idée d’un coiffeur du pays nantais voulant donner de la fierté à ceux qui n’ont plus rien sur le caillou, la Confrérie nationale des chauves de France s’est longtemps réunie chaque année dans le village, pour la plus grande gloire de ses moins de 300 habitants. Et toujours, ses adhérents ou sympathisants se faisaient tirer le portrait à côté de la fameuse pancarte sur la D 67. Il y eut même un autre coiffeur – Yannick Jegou de Montoire – qui sut exploiter le filon en 1984 : il convia la présidente des perruques Annie Davray et le fils de Marcel Cerdan qui prêtait son nom à la marque sur le 1er Championnat de France cycliste de la coiffure. Clin d’œil magnifique : la photo souvenir fut faite à Villechauve qui était sur le parcours !
Le photographe de Greenpeace
En 1998, c’est le photographe attitré de Greenpeace, Pierre Gleizes qui jette son dévolu sur l’insolite signalétique. Ce passionné de son terroir qui vit alors à Lunay immortalise la confrérie lors du rendez-vous de septembre et glisse l’image dans une série de cartes postales du Loir-et-Cher. Cette photo, très bien construite, gaie et colorée, circule toujours sur le web ; elle fut la plus remarquée de la série. Elle a même figuré dans un reportage d’un magazine arabe.
Au début de 2021, un jeune globe-trotteur – Félix Renoult – publie «Mon tour de France en passant par Mars», guide photographique dans lequel il se met en scène devant les panneaux de communes les plus insolites. Problème pour Villechauve : il a plutôt le crâne bien fourni. «Alors j’ai retouché la photo en superposant un gros-plan de mon genou sur mon crâne !» s’amuse-t-il.
Ainsi, la pancarte de la petite commune du Vendômois fait-elle le bonheur des amateurs d’insolite. Elle est souvent classée parmi une quarantaine en France dont les noms prêtent à sourire et qui n’en changeraient pour rien au monde. A la faveur de leurs vacances, certains quadras à la calvitie naissante s’amusent à coupler la photo souvenir avec celle prise à Carentan, dans la Manche…
Pour finir, savez-vous qui fut le premier maire de Villechauve en 1790 ? C’était le curé Chauvin, prêtre de la paroisse. Il y a des noms prédestinés.
Henri Boillot
Le saviez-vous ?
Villechauve vient du latin villa calva. Le sens en était déjà celui de crâne dégarni. Le plus probable est que l’habitation gallo-romaine d’origine était située sur un plateau peu boisé. Le département du Calvados (qui produit le calva !) aurait la même étymologie : de calva dossum – dos chauves – c’est à dire « les hauteurs dénudées », sachant qu’il ne s’agissait à l’époque que des côtes découvertes par les marins.