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La fabrique de la musique

Posés à La Fontenelle, au nord de Mondoubleau, les ateliers du luthier Christophe Jegou livrent des créations originales qui lui ont valu les échos de la presse internationale.

C’est parce qu’il rêvait de posséder une National, mythique guitare à résonateur, cousine du Dobro, et qu’il n’en avait pas les moyens, que Christophe Jegou a basculé. Autodidacte, loin de la dynastie de Crémone, il a pris conseil auprès de pointures de la profession, inspiré aussi par des figures du métier, comme Mike Lewis. Originaire de Bretagne, après 15 ans passées à Paris, le luthier a choisi de poser ses flight case à La Fontenelle: «A mi-chemin entre la Bretagne, où j’ai mes attaches, et Paris, où j’ai de nombreux clients.»

«Modèle F, Teso, Cormier, Blues Deluxe»… des guitares uniques, au look parfois surprenant, futuriste, comme cette «Bluestic» à la caisse en polycarbonate moulé et au manche acajou, encensée par le célèbre Patrick Dietsch dans Guitarist Magazine. Seule guitare acoustique transparente au monde, elle a été saluée par nombre d’articles de presse, y compris à l’étranger.
Des guitares qui vont bien, mais surtout les amplis qui vont avec. «Pour moi, l’instrument guitare électrique est constitué de la guitare et de l’ampli. Maîtriser l’ensemble de la chaîne me paraît cohérent. Mes connaissances me permettent de concevoir et de réaliser les deux parties. D’ailleurs, dans une vie antérieure, j’ai été ingénieur en informatique. De plus, la guitare électrique comporte déjà un travail de l’électronique à travers le circuit de micros.» Des amplis entièrement à lampes, en pin massif ou en bouleau nordique, rallumant l’éternelle guerre avec les partisans des transistors. En pièce maîtresse, son «Crazy Horse», un ampli au look épuré, mais à la palette sonore étendue. Et de son atelier ne sortent que des guitares électrifiées, en cohérence avec le discours et la complémentarité prônée par l’artisan:

«Je ne fabrique pas de folk, beaucoup de luthiers sont beaucoup plus doués que moi pour cela.»

Nombre de commandes pour une clientèle de pro ou de semi-pro, essentiellement de la capitale, mais aussi beaucoup de dépannages et de réparations pour les musiciens locaux, avec lesquels le luthier entretient des liens, comme avec le groupe de musique tzigane Zangora.

Les Oignons frits «on stage»

Musicien lui-même, guitare et piano classique, fan de Johnny Winter et de Johnny Thunders, le bonhomme peut s’atteler à l’ouvrage jusqu’à une centaine d’heures pour la réalisation d’une pièce. Ce qui ne l’empêche pas de changer de partition de temps à autre, et d’investir les scènes, de Mondoubleau à Montigny-lès-Metz, avec Les Oignons frits, son groupe de rock, pour des reprises décapantes, au tempo survitaminé, de Nino Ferrer ou de Vince Taylor.
Pas de hasard non plus s’il a pris en charge six fois de suite, jusqu’en 2014, l’organisation de la Fête de la musique à la Commanderie d’Arville, «un ensemble de bâtiments du XIIe siècle, magnifique endroit pour jouer.» Réunissant un millier de personnes chaque année, dans une commune de 90 habitants! Passant de la scène à la régie, avec une programmation éclectique, il a accueilli à la Commanderie des têtes d’affiches, comme le bluesman américain Terry Lee Hale, ou des artistes du sound system, de la musique irlandaise, louvoyant aussi avec la chanson française et le rock. Une opération en stand-by que Christophe envisage de relancer dès 2017, appel lancé donc aux groupes intéressés.
Son seul grand bémol pour cette Fête de la musique 2016, l’annulation de l’événement à Trôo, où Les Oignons frits étaient programmés:

«J’ai beaucoup de regrets, c’était une très belle fête, dans un endroit génial…»

Une annulation qui a surpris, une fête victime de son succès, mais qui pourrait à terme revenir. Comme disait Pierre Desproges: «On ne saura jamais où partent les oignons avant de les faire revenir…»

guitares.jegou.free.fr/web
Tél.: 02 54 89 80 15

Jean-Michel Véry

Journaliste à Politis, à Europe 1, au Petit Vendomois, rédacteur "tourisme" à Néoplanète, pigiste au Figaro et à l'Optimun.

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