Les hôteliers-restaurateurs s’enrhument et sentent monter la moutarde
Ils hurlent contre la concurrence plus que déloyale et exigent une application stricte de la Loi.
Les membres de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie de Loir-et-Cher (UMIH 41) tenaient assemblée générale à La Maison des Entreprises, sous la présidence de Gilles Martinet, en présence de Roland Héguy, président confédéral qui, grâce à son accent chantant du Sud-Ouest, apporta un peu de soleil dans la morosité ambiante qui régna tout au long de cette réunion.
En effet, le 70e anniversaire de cette structure syndicale est marqué par de très nombreux problèmes déclenchés par des concurrences sauvages, non ou très mal réglementées, dues au monde moderne dans lequel la société évolue, le numérique n’ayant pas apporté que du bon, loin de là.
Ainsi, les restaurateurs et hôteliers sont fortement touchés par les propositions émanant de plates-formes ubérisées ou même de particuliers proposant à des prix cassés ou sans commune mesure avec les tarifs pratiqués par les professionnels, des prestations en repas, couchage, petits déjeuners, loisirs, sans trop de respect des normes d’hygiène, d’accessibilité et de sécurité. Tout le monde peut, via Internet et les réseaux sociaux, s’improviser hôte et accueillir chez lui, dans sa simple maison, une flopée de pensionnaires, sans limites. «Rien ne va plus» clament les professionnels, qui en appellent au gouvernement et à sa sagesse citoyenne pour régir, avec plus de sérieux et beaucoup de sévérité constructive, ces travailleurs au noir.
«Il y a eu trop de laisser-aller au fil des ans et la situation s’amplifie. Les uns remplissent leurs maisons avec des clients qu’ils ont volés aux autres. Ces plates-formes et ces particuliers sont des prédateurs, des financiers sans scrupules pour qui seul compte l’argent bien mal acquis, mais ils n’ont aucun dépit, ni pudeur pour le ramasser».
Il semble bien inutile de préciser que peu de prestations sont payées par carte bancaire ou chèque. La seule piste pouvant mener à une identification de ces prestataires de services serait l’application de la taxe de séjour. Mais il faudrait être naïf pour la régler, ce qui correspondrait à se tirer une balle dans le pied ou à s’auto-dénoncer…
En plus des normes et réglementations, en plus des obligations, en plus des contrôles qu’ils subissent sous toutes les formes dans leurs entreprises, les professionnels de l’accueil et du tourisme rappellent que ce secteur est porteur de devises, d’euros et, surtout, d’emplois.
«Le tourisme est la dernière activité positive, tout le reste étant mort ou moribond. Qu’on nous laisse travailler en paix et que l’État nettoie tout ce qui parasite notre métier. Qu’il pense bien que, dans les zones rurales, ce sont les derniers points commerciaux présents, avec, souvent, des multiservices de proximité ouverts presque 24 heures sur 24, pour la survie de la population qui s’y étiole avant de mourir. Le pouvoir d’achat est à la baisse. La guerre des panneaux publicitaires, qui doivent disparaître du paysage français, va achever certains commerces, déjà sous perfusion. On va vers une désertification du tissu national. Et nous allons mourir en regardant d’autres citoyens français se remplir les poches avec des prestations frauduleuses».
Le ton est donné. La moutarde monte au nez des chefs et des loueurs patentés de sommeil. Ils sont souvent au piano, mais trouvent que la partition n’est pas d’équerre avec leurs préoccupations. Et, cerise sur le gâteau, en plus des allergènes à annoncer dans les menus, en plus de la lutte contre l’abus d’alcool et le trop gras, on cherche à leur imposer des autocollants sur les façades de leurs établissements avec des pictogrammes annonçant le sourire ou non d’un smiley qui indiquerait le degré d’hygiène des maisons visitées par des agents assermentés.
«Ce sera le meilleur moyen de couler une entreprise en lui apposant ce que personne n’ose nommer une étoile jaune. Trop, c’est trop !» dénonce la profession qui ne veut plus trinquer.
La pression monte dans la marmite et le drapeau noir flottera bientôt à la façade des hôtels. La moutarde grimpe dans le nez des chefs et, avant de mourir au champ d’honneur de la bêtise administrative, les professionnels en appellent à la sagesse des pouvoirs publics, des élus et de la bonne foi. Ils réclament du soutien, sous toutes ses formes. Reste à savoir si la clientèle se mobilisera pour ces professionnels de bouche, recensés à environ 20 à 30.000 membres, alors qu’il y a plus de 160.000 établissements déclarés…officiellement en France. Quant aux autres, c’est la purée de pois. Le fog diraient nos amis, les Britanniques… Cela va être dur de légiférer maintenant que le mal tend plus vers une amputation à vif qu’une guérison longue et patiente. La colère gronde et le potage a le goût de rata. Heureusement qu’il ne gèle pas à la veille de ce mois d’avril…, ce qui risquerait de foutre la saison par terre.
Richard MULSANS