Edito de janvier 2020 : L’aventure c’est l’aventure
Dans la soirée du 19 novembre 2018, à l’aéroport japonais Haneda, un homme se fait arrêter par les agents du procureur de Tokyo. Un personnage de notoriété, plutôt reconnu pour son sens des affaires et ses compétences stratégiques d’entreprises que pour être un voyou, Carlos Ghosn le tout-puissant patron de Renault-Nissan-Mitsubishi est accusé entre autres d’inexactitudes concernant les déclarations de ses propres revenus, les ayant minimisés.
Né en 1954 au Brésil, puis au Liban à l’âge de six ans pour enfin venir à 16 ans en France suivre ses études en classes préparatoires scientifiques de mathématiques supérieures et intégrer l’Ecole des mines, Carlos Ghosn a déjà une enfance pas commune, faite de voyages et de rencontres avec des civilisations différentes, une diversité culturelle hors normes. Dans l’entreprise Michelin à la fin des années 70 jusqu’en 1996 à différents postes de responsabilité dont celui de responsable des opérations du fabricant de pneus en Amérique du Sud, il organise l’absorption d’Uniroyal et Goodrich par Michelin, restructurant à tour de bras.
Arrivé dans le groupe Renault en tant que directeur général adjoint en 1996, il joue un rôle clé dans le redressement économique du groupe en réduisant les coûts. Il en devient le Président directeur général en 2005 et également président du conseil d’administration du groupe japonais Nissan dont il a été PDG en 2017 et 2018, jusqu’en novembre car arrêté par la justice japonaise sur le Tarmac de l’aéroport et mis en prison dans le centre de détention de Kosuge au nord de Tokyo avant d’être en résidence surveillée avec des restrictions quant à ses visites.
Depuis décembre dernier, c’est le rebondissement, fuyant le Japon où il devait être jugé en 2020, Carlos Ghosn a débarqué au Liban dans des circonstances tout à fait ubuesques. Une grande évasion planifiée depuis plusieurs jours, sûrement due également après s’être vu refuser une énième fois un entretien avec sa femme Carole à l’occasion des fêtes de Noël. Déclarant dans un communiqué publié qu’il n’a pas fui la justice mais échappé à l’injustice et la persécution politique. Que penser d’un homme puissant choisissant comment il devrait être jugé, dans un état démocratique du reste ? Il est tout de même accusé d’avoir enfreint la loi japonaise, de s’être échappé à un tribunal et donc de participer à une curieuse conception de la justice. Car même si nous avons découvert en même temps que lui, la dureté des prisons nippones, il a eu cette chance d’avoir été favorisé avec une liberté surveillée, beaucoup moins stricte que les premiers jours de son arrestation. Sans oublier bien sûr que son ancien bras droit, Greg Kelly, considéré comme la cheville ouvrière des montages litigieux est toujours au Japon dans l’attente de son jugement.
Carlos Ghosn s’accroche, malgré l’accumulation de preuves et révélations à défendre la thèse du complot. S’il est libre au Liban, car le mandat d’arrêt international ne s’applique pas dans son pays, il reste dans une prison dorée mais prison tout de même. Une vie qu’il a choisie, ayant signé avec cette évasion extraordinaire, sa culpabilité. Un film à voir prochainement sur Netflix, Carlos Ghosn aurait signé un partenariat d’exclusivité avec la plateforme de streaming. «La Casa del Carlos», prochainement sur vos écrans !