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Photographie : Jules Ludic, un œil sur les barricades

Il y a 50 ans… Mai 68. Quand la réalité inspirait le jeune photographe Jules Ludic, du haut de ses 20 ans. Un anniversaire soixante-huitard qui fera sans aucun doute l’objet de nombreux débats et de rétrospectives cette année. Pour le Petit Vendômois, regards posés sur des archives très personnelles dont nous avons eu l’exclusivité et qui seront exposées à La Chartre.

 

Jules Ludic Photographe parisien, Jules Ludic, natif de la capitale, apprend les ficelles du métier en suivant une formation à l’Institut français de la photographie. Son premier appareil : le célèbre vintage «Brownie flash» de Kodak, avec sa housse en cuir des plus fermes qu’il fallait surtout tenir éloignée du viseur pour réussir son image. Pas une communion ni un mariage n’est passé off durant les années 1960. Mais il fallu passer au stade supérieur, l’Institut demande alors aux élèves de travailler avec un 6×6 Rolleiflex. A la fin de ses études, Jules traîne du côté de l’Olympia, grâce à sa malice, il charme une des caissières et accède aux coulisses. Car c’était ainsi à l’époque, pas de vigie-pirate, pas de blocage à l’entrée des lieux publics. Ce qui a permet à certains, comme Jules Ludic, de guetter, d’observer, de saisir l’instant où la personnalité, la «vedette», comme on disait à l’époque, arrivait. Il fallait avoir le bon cliché, la photo que personne n’avait. C’était le cahier des charges afin de pouvoir la «vendre» aux magazines. Comme ce portrait de James Brown, paru dans Paris Match. «Une double page». Pas mal du tout pour une première.
Il avance ainsi, mais ce n’est pas assez créatif pour lui. Il ressent l’envie de faire du «mouvement», donne des cours de poses aux futurs mannequins et réalise les books indispensables pour se faire repérer et travailler. Tombe les années 80-90, la pub explose. Jules fait des campagnes de pub avec Jean-Paul Gaultier, Thierry Mugler, Montana. Il collabore avec Vogue, Jardin des Modes, Elle, Le Matin de Paris… en rubrique mode. Tout était alors possible si l’on travaillait bien et qu’on avait des idées. Suivent les années catalogues. Il ose. Il monte des expositions, dont sa première au Palace, lieu mythique et emblématique de la fête, là où il fallait absolument se faire voir. Puis une autre expo, à la Locomotive, encore un endroit hyper tendance pour l’époque. Tout le monde s’y croisait, les chanteurs, les mannequins, quelques stars du show-biz et des Parisiens en quête de s’amuser, de danser et de picoler !

 

Des voitures qui brûlent… et des canons à eau

 

Jules a son propre labo, d’ailleurs presque tous les photographes en avait un.
Ils bidouillaient leurs tirages. Années 2000 et changement de programme. C’est dans la Sarthe, en pleine campagne, qu’il s’installe : «Une vraie ferme, où il y avait vaches, chevaux, pigeons, vignes, le tout dans son jus !» Coup de foudre, ce sera là qu’il posera ses cartons de souvenirs. Dans une grange, Jules essaye de trier, d’archiver toutes ses belles années. Il prospecte un peu et se dit que dans sa région, il pourrait proposer une exposition de ses clichés réalisés en Mai-68, ou il avait une envie folle de tout saisir et de tout mettre en boîte. Chose faite, l’événement se déroulera à la mairie de la Chartre-sur-le-Loir. Une vingtaine de tirages, deux ou trois grands formats 1m x 1m, des négatifs, des 24 x36 non montés… Sur cette rétrospective, on pourra voir et comprendre comment cela c’est réellement passé. Tout y est vrai. Des scènes de vie, de rue, des mouvements, des voitures qui brûlent, la Faculté de médecine, avec sa grande banderole rouge sur laquelle on peut lire «Pouvoir étudiant». Beaucoup de fumée aussi, de cars de police, des forces de l’ordre armées jusqu’aux dents, des masques, des baïonnettes, des mobylettes, des vélos, on peut s’amuser à chercher la marque des voitures non calcinées, Simca 1000, Fiat 500, D.S et même des deudeuches ! Mais aussi des hommes à terre, des rangées de CRS en charge, des affiches de grève, des canons à eau, bref, c’était la révolution… Notre coup de cœur : une photo ou l’on distingue au premier plan une tête de statue qui jonche le sol, et en arrière plan des manifestants en mouvement.

 

Photos Marc Broussard.

 

«Mai 68, Photographies de Jules», du 11 mai au 16 juin,
à la mairie de La Chartre-sur-le-Loir.
Vernissage le 24 mai à 17h.

 

Si vous souhaitez apporter votre témoignage : jules.ludic@wanadoo.fr.
À transmettre avant le 13 mai.
Site internet du photographe : www.julesjarry.fr

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