Une gare pas comme les autres
En plein cœur du Perche, un jeune couple fait revivre une époque désormais révolue, celle des lignes ferroviaires de campagne, en restaurant et habitant l’ancienne gare de La Fontenelle.
Presque une maison de poupée, cette petite gare de la fin du XIXe siècle. Posée désormais sur un tapis verdoyant, elle se réjouit d’avoir retrouvé sa joliesse d’hier avec son tout nouveau toit en zinc au dessus de l’ancienne lampisterie. Elle doit cette cure de Jouvence à un couple tombé amoureux de son charme désuet. Serge et Stéphanie Boué, travaillant respectivement dans le secteur bancaire et dans l’Éducation nationale en région parisienne, en ont fait l’acquisition il y a maintenant sept ans. «Nous voulions trouver une résidence secondaire à une heure et demi de Paris mais sans autre impératif. Nous avons visité un certain nombre de maisons jusqu’à découvrir celle-ci sur internet. Fille de cheminot, je ne pouvais rester insensible !»
Arrivés presque par hasard, ils ont su attraper le relais mémoriel de ce lieu atypique en nouant des liens forts avec l’ancien propriétaire, Didier Gadois, dont la mère fut la dernière chef de gare «Mes parents sont arrivés en 1937 ou 1938. Mon père était cantonnier à La Fontenelle. Je nous revois, avec ma sœur qui est née ici, courir pour aller fermer la barrière qui est à cent mètres. On partait toujours à la dernière minute avant le passage du train et ma mère devait nous rappeler à l’ordre.» D’autres anecdotes sont partagées par Didier avec Serge et Stéphanie «Je me souviens d’une dame qui venait du Gault-du-Perche pour aller au marché à Droué. Elle a rouvert les barrières pour ne pas attendre mais le train est passé et, coup de chance, seule sa carriole a été écrasée.»
Après l’arrêt de la ligne, au milieu des années 50, la famille est restée comme locataire dans les lieux avant de l’acquérir en 1971. Ayant reconstitué l’histoire récente des lieux, le couple a voulu en savoir plus sur son origine et se sont lancés à la découverte des lignes de chemin de fer du XIXe siècle. «C’est la ligne n°53 du plan Freycinet. Longue de 50,7 km, elle traverse trois départements : Eure-et-Loir, Loir-et-Cher et Sarthe. Dans le Loir-et-Cher, elle passe sur les communes du Plessis-Dorin, Saint-Avit, Oigny, Le Gault, Arville, La Fontenelle et Le Poislay.»
Sur cette ligne Châteaudun – Connéré par Courtalain, ouverte de 1898 à 1943, il ne devait exister qu’une gare réunissant Le Poislay et La Fontenelle «Jusqu’en août 1898, il ne fut question que d’une seule gare dans les délibérations du Conseil Général du Loir-et-Cher. Cependant, à l’ouverture de la ligne, deux gares indépendantes étaient construites. La gare de La Fontenelle, comme toutes les gares de la ligne, fut construite par l’ingénieur Louis Harel de La Noé.»
Ainsi, cette gare, qui n’aurait pas dû naître puis, qui aurait pu disparaître après des décennies d’inactivité, renaît-elle chaque jour de ses cendres avec un poêle qui a retrouvé sa place, une toiture débarrassée du bardeau bitumineux remplacé par «un zinc à joints debout de 25 mm pour compenser la dilatation sur un plancher de sapin et un sertissage inox» explique l’artisan Pascal Froger, lui aussi totalement énamouré du lieu.
Une belle synergie qui a d’ailleurs obtenu un Label de la Fondation du Patrimoine.